Enfant prématuré, maman avec sa culpabilité

Bien souvent, les mamans d’enfants prématurés ressentent de la culpabilité dès l’accouchement et cela bien longtemps après, voire même des années plus tard… Nous vous proposons ici un extrait du livre « Ma petite Brindille : témoignages et conseils autour de la prématurité », dans lequel une maman témoigne de son expérience de son accouchement prématuré.

Nous faisons connaissance trop tôt

Là, où tout bascule

« Il faut vous reposer ! Arrêtez la voiture ! »

Le médecin a peut-être raison. Du coup, repos obligatoire, pause canapé. Puis nous nous retrouvons en vacances. Je suis alors enceinte de quatre mois et demi environ. Nous poursuivons nos achats. Nous préparons la chambre de la petite fille qui va naître au début de l’année prochaine. Je me vois déjà accoucher pendant les fêtes… Et bien cela ne se fera pas !

Fin septembre, début octobre, dans mon sixième mois de grossesse, tout a basculé. (…) Des douleurs, faibles d’abord pendant deux jours, jusqu’à cette nuit de début octobre où elles sont devenues insupportables. Une nuit sans dormir. Un cachet pour soulager mais en vain. Je découvrais ce qu’était une contraction sans vraiment le savoir. Au petit matin, je me lève, un peu mieux et là : « Je perds du sang », dis-je à Monsieur, qui inquiet, lance sans attendre : « Habille-toi, je t’emmène aux urgences ! » (…)
A peine arrivés, on nous fait patienter quelques instants, puis on m’installe dans une salle d’auscultation. Le monitoring en marche, je commence à m’inquiéter, à trembler. (…)
« Que se passe-t-il ? »
Réponse du médecin :
« Vous êtes sur le point d’accoucher. Si on ne fait rien, vous risquez l’accouchement canon. On va vous transférer au CHU. » (…)
Au bout d’une dizaine de minutes, le Samu arrive. On m’installe dans l’ambulance, direction le CHU. Arrivés sur place, pendant que Monsieur s’occupe de l’entrée administrative, je suis prise en charge par une infirmière des urgences. (…) Nous sommes soumis à une panoplie de questions sur la vie quotidienne, l’hygiène de vie, la santé… (…) Puis on passe à l’examen médical, puis à l’échographie. (…) Une petite injection pour le développement des poumons de bébé, puis un pédiatre arrive et nous explique les risques neurologiques, de handicap moteur, de déficience visuelle… sans oublier le risque élevé de décès. (…)
On m’installe dans une chambre double. Très fatigué par cette journée, Monsieur rentre à la maison. Je reste seule dans une grande chambre, une perfusion dans le bras, les larmes aux yeux, (…) . Un bip-bip stressant au dessus de la tête me rappelle que tout ne va pas bien. (…) »

La naissance

Samedi matin, le lendemain de mon hospitalisation, les contractions reprennent à nouveau. L’équipe médicale tente tout pour les stopper jusqu’à l’après-midi mais en vain. Je suis pliée en deux, souffle à chaque douleur et Monsieur a le doigt perpétuellement sur le bouton d’appel. (…)

Dimanche, sept heures du matin, le petit-déjeuner arrive. (…) Je me suis réveillée le sourire aux lèvres : plus aucune douleur. (…) J’ai peut-être parlé trop vite. Après le repas vers 13 h 30 environ, les contractions réapparaissent de plus en plus fortes. L’équipe médicale débarque au grand complet. Ecoute des contractions, observation du col déjà bien ouvert, un liquide coule entre jambes doucement… « La poche des eaux est percée. On va vous descendre en salle d’accouchement. Cela ne veut pas dire que vous allez accoucher. C’est juste une prévention. »

Mais bien vite, plus de prévention. A peine descendue en salle d’accouchement, on regarde à nouveau mon col, ouvert au maximum : « Il se présente par la tête et il est déjà engagé. »

L’anesthésiste arrive. Enfin la péridurale ! Quel soulagement ! Un tel soulagement que je ne sens même plus mes jambes, ni les contractions. Monsieur est à mes côtés. A peine installée, l’équipe médicale, me demande de pousser, un, deux, trois, quatre et ça y est ! Un petit, un tout petit bébé est né. Même pas un kilo, dans les 900 grammes, mais avec de la voix. « Elle est née dans sa poche : ça porte bonheur ! » nous lance le médecin. « Espérons-le… »

Le pédiatre prend le relais. Monsieur assiste aux premiers examens de bébé, pendant que je pleure à n’en plus finir… On me présente très vite ma petite fille pour un premier baiser. Je lui donne un doudou que j’avais gardé sur moi, histoire qu’elle ait l’odeur de sa maman avec elle, à défaut de l’avoir à ses côtés. Très vite, on me la reprend. Elle est mise en couveuse et conduite par le Samu en réanimation pédiatrique.

Accouchement, délivrance, séparation… Je me sens seule. (…) Il ne me reste que la solitude, mes remords, mes regrets, mes pleurs, mon malaise et ma culpabilité. (…)

Plus de trois mois d’hospitalisation

Nous voilà partis pour trois mois d’hospitalisation et huit jours d’inquiétudes, de doutes, de craintes, de peurs… Mais aussi d’espoirs et de renaissance, de joie et de vie. Trois mois de bataille pour une vie, pour sa vie. ( …) Pendant ces trois mois, c’est un véritable combat que nous avons mené, qu’elle a mené… (…)

Extrait du livre « Ma petite Brindille : témoignages et conseils autour de la prématurité » de Marjorie Michaud

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